Le président de la Transition malienne, le général Assimi Goïta, semble bien décidé à inscrire durablement son nom au sommet de l’État. Lors du Conseil des ministres du 11 juin 2025, le gouvernement malien a validé un projet de loi révisant la Charte de la Transition. Cette réforme majeure prévoit l’instauration d’un mandat présidentiel de cinq ans renouvelable, à compter de cette même année. L’initiative s’inscrit dans un contexte régional tendu et dans une dynamique de redéfinition institutionnelle engagée par la Confédération des États du Sahel (AES).
Une réforme aux racines stratégiques et sécuritaires
L’argumentaire présenté par les autorités maliennes repose sur la poursuite d’un processus de stabilisation encore inachevé, malgré les avancées constatées. L’adoption d’une nouvelle Constitution en 2023 et le contrôle élargi du territoire par les forces armées n’ont pas suffi à apaiser les menaces sécuritaires persistantes. Le gouvernement souligne la nécessité de prolonger la transition afin d’atteindre une « pacification totale » de l’État. Cette réforme fait écho aux recommandations issues des Assises Nationales de la Refondation, tenues en 2021, qui avaient priorisé les réformes institutionnelles avant toute élection. Pour Bamako, la stabilité passe désormais par la continuité au sommet de l’État, en lieu et place de processus électoraux jugés prématurés dans le contexte actuel.
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Une transition alignée sur la Confédération AES
Ce virage politique s’inscrit dans une logique d’harmonisation régionale, notamment avec les États partenaires du Mali au sein de l’AES : le Burkina Faso et le Niger. Tous trois, unis par la Charte du Liptako-Gourma depuis juillet 2024, ont quitté la CEDEAO pour construire une nouvelle alliance stratégique, fondée sur la souveraineté, la coopération sécuritaire et la rupture avec certaines influences extérieures.
Ainsi, le mandat présidentiel renouvelable que s’apprête à instaurer le Mali reflète une volonté de cohérence interétatique, chaque pays de l’AES visant une gouvernance stable pour mieux affronter les défis communs.
Une décision présentée comme conforme aux aspirations populaires
Les autorités maliennes défendent cette révision de la Charte non pas comme une dérive autoritaire, mais comme une réponse aux attentes exprimées lors des concertations nationales. Le projet, désormais entre les mains du Conseil national de transition pour examen, devrait être entériné avant sa promulgation par Assimi Goïta lui-même.
Arrivé au pouvoir à la faveur du coup d’État du 18 août 2020, le général Goïta s’était d’abord illustré comme vice-président avant de prendre la tête de la Transition après un second coup de force en mai 2021. Son maintien à la présidence, désormais adossé à un mandat constitutionnel, ouvre la voie à un exercice du pouvoir plus pérenne, dans un cadre institutionnel redéfini.
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Entre souveraineté assumée et réformes controversées
Alors que certains observateurs dénoncent un recul des normes démocratiques, les autorités maliennes défendent leur démarche comme un ajustement aux réalités nationales et régionales. Pour elles, la priorité demeure la sécurité, la stabilité institutionnelle et la consolidation de l’État. La question reste toutefois entière : cette réforme marquera-t-elle un tournant vers un nouvel ordre politique solide ou prolongera-t-elle une transition indéfinie sous une autre forme ?
SOURCE : BANOUTO